Adam Naas : « De plus en plus, j’ai envie de niquer des mères »

Son extraordinaire voix androgyne fait de lui une des étoiles montantes de la scène française. Adam Naas a récemment sorti son nouveau projet, The Love Album, deux ans après son EP qui avait cartonné, notamment avec le tube Fading Away. L’extravagant parisien, métamorphosé avec une coloration jaune canari et des lunettes de soleil en cœur, nous a reçus avant sa prestation cinq étoiles aux Aralunaires, début du mois de mai.

©Johan Poezevara, Fabien Silvestre Suzor
©Johan Poezevara, Fabien Silvestre Suzor

Certains médias t’ont comparé à Prince, Jimi Hendrix et Childish Gambino, ça fait quoi d’être comparé à des noms pareils ?

Je serais un peu un connard si je disais que ça me faisait chier, ce qui n’est pas du tout le cas, c’est quand même très flatteur. Et puis c’est bien c’est un peu toutes des personnes basanées donc ça me fait extrêmement plaisir, plus que si on me comparait à Michel Delpech.

Toi-même tu te reconnais en eux ?

Moi je me sens Adam Naas, c’est déjà beaucoup pour moi. Je n’arrive même pas à comprendre ce que c’est donc si on me rajoute en plus d’autres personnalités ça va être un peu compliqué. Après, tout le monde a son propre truc à apporter dans la musique, donc j’entends les comparaisons et cela me fait extrêmement plaisir, mais je t’avoue que je m’en fous un peu.

Deux ans après ton EP, tu as sorti ton premier album, tu es fier de son accueil ?

L’album a été super bien reçu, il a eu des super bonnes critiques. Après, critiques ou pas, on s’en fout. Moi je sais que j’ai été très content de cet album. Quand tu te regardes dans le miroir en écoutant l’album et que tu commences à te masturber sur une de tes chansons, c’est plutôt bon signe. J’ai un peu une passion pour les « underdogs », ces personnes qui sont mises de côté parce qu’on ne sait pas trop qui ils sont, ce qu’ils font… Ce sont des gens qui vivent ce qu’ils ont envie de vivre et qui sont très heureux de le faire sans aucune contrepartie donc je me considère un peu comme ça. Mais de plus en plus j’ai un peu envie de niquer des mères. Je commence à développer une espèce de sentiment de « show me what you got and I’m gonna show you what I got ». Mais en même temps je suis en train d’évoluer avec des artistes qui sont vraiment très intéressants et vraiment très stimulants donc c’est vraiment cool.

D’où vient le mélange de styles dans ton album ? Ce sont les inspirations diverses ?

Je pense que cela m’est un peu tombé dessus. J’écoute vraiment de tout, mais c’est compliqué de faire plein de choses. Mais plus je connais ma voix et plus je me rends compte que je peux faire beaucoup avec, donc il y a des moments où j’ai envie de créer des milliards de side-projects, l’un un peu folk, l’autre un peu rock, l’autre pop-rock, l’autre garage… Puis je me suis dit que je n’en avais un peu rien à foutre, c’est ma musique donc j’ai envie de tout mélanger.

Tu as mis un peu l’amour au centre de ton album, mais on a l’impression que c’est un amour assez mélancolique, assez triste. C’est ça ta vision de l’amour ?

L’amour c’est génial jusqu’à ce que ça ne le soit plus. J’avoue que j’ai eu des relations un peu chaotiques, mais qui étaient très cool du coup je ne les regrette pas du tout. C’est hyper drôle parce que quand tu termines des relations, un an après tu as tendance à te souvenir des bons moments, mais pas des mauvais. Cet album est empreint de nostalgie, mais pas de mélancolie. Il n’est pas triste, ce sont juste des souvenirs passés. Au début, je n’avais pas prévu de l’appeler comme ça, c’est juste en l’écoutant que je me suis rendu compte que c’était quand même central. Et puis l’amour prenait beaucoup de place dans ma vie, je considérais toutes mes relations en fonction de l’amour aussi bien fraternel qu’amical, que physique ou psychologique. Puis ça m’a un peu cassé la tête, je me suis dit que tout ne tournait pas autour de l’amour donc j’ai voulu écrire tout ça pour m’en débarrasser et pouvoir me consacrer à de nouveaux textes.

Comment as-tu vécu le succès de Fading Away ?

C’était un peu absurde. C’est quand même drôle : tu fais une chanson, puis t’enregistres un clip avec un pote sur un toit d’une amie, puis tu mets ça sur Youtube parce que tous tes potes voulaient voir le clip parce que ça les faisait marrer et tout d’un coup tu reçois plein de mails de beaucoup de gens et de maisons de disques. Très rapidement, ça m’a fait un peu flipper. Moi j’avais envie de vendre des fleurs ou d’aller lire des bouquins à la librairie, du coup je n’avais pas envie de rentrer dans ce délire de faire de la musique et de parler à des gens à qui je n’avais pas envie de parler, je trouvais ça hyper chiant. Après on m’a un peu foutu un coup de pied dans le cul en me disant qu’il fallait quand même que j’essaye. J’ai essayé, j’ai goutté et depuis je suis un peu addict.

Tu envisages de chanter un jour en français ?

Je pense que je vais chanter japonais avant de chanter français. J’ai écrit quelques chansons en français pour certaines personnes, mais ce n’est pas possible. Déjà c’est très compliqué de le chanter, mais aussi de l’écrire, car c’est ma langue maternelle, donc je suis toujours là à me poser des questions sur le placement des virgules, des compléments d’objet… C’est hyper particulier. Et vu que j’ai envie de créer une espèce de carte au trésor avec des doubles significations, en français c’est toujours un peu labyrintheux comme histoire.

Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour le futur ?

Un peu moins charger mes bloody mary, mettre un peu moins de vodka dans mes cocktails parce que ça me détruit très souvent. Et à part ça, continuer de m’amuser avec mes potes. Je pense que le deuxième album va vraiment être bien, il y a des artistes que j’ai vraiment bien kiffés ces dernières années, avec qui je suis assez proche. Je vais faire un morceau avec Jeanne Added sur une de mes chansons, et ça ne me dérangerait pas d’avoir un petit Voyou qui fasse de la trompette sur une de mes chansons. Et puis mon batteur a pas mal passé de temps avec des artistes parce qu’on s’est tous rencontrés à Abbey Road, c’est là où j’ai rencontré Juliette Armanet et Jeanne Added et beaucoup d’autres gens donc on reste en contact. Je n’arrive jamais à rester clair dans un mouvement, malheureusement pour tout le monde qui m’entoure, je pense que ça va être un peu compliqué de me suivre de temps en temps, mais c’est comme ça, ça me fait marrer.

Interview : Guillaume Scheunders

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